Publié le 2 septembre 2024

« Et si les quartiers entraient en transition ?  » : de l’expérimentation à la création d’un réseau régional

Récit d’une nouvelle journée de mobilisation des acteurs et actrices territoriaux pour accélérer la transition dans les quartiers.

Mardi 11 juin 2024, Villes au Carré organisait à Orléans la journée-bilan de l’expérimentation menée en 2022-2024 en région Centre-Val de Loire. Un événement à l’enthousiasme révélateur réunissant 41 participant·es, dont 14 acteur·ices issu·es des 6 territoires engagés dans l’expérimentation, qui ont ainsi eu l’occasion de présenter leurs vécus et d’en partager les apports. Un événement fondateur qui a permis de réfléchir collectivement à l’intégration des enjeux de transition écologique dans les nouveaux contrats de ville, d’identifier et de comprendre les leviers à actionner pour réussir le défi de la transition écologique dans les quartiers en ne laissant personne de côté, et à poser ensemble les bases d’un nouveau réseau régional « Transitions & Quartiers ».

CONVIVIALITÉ & INTERCONNAISSANCE

Si la préoccupation pour la justice sociale, environnementale et démocratique est une base commune, apprendre à se connaître et se rencontrer est un prérequis essentiel pour travailler ensemble. Villes au Carré l’a bien compris ! 

Parmi les personnes présentes et engagées dans le projet, on compte bien sûr les acteur·ices des contrats de ville et de l’environnement : élu·es et technicien·nes des Villes et des Intercommunalités, mais aussi des habitant·es. S’ajoutent le Mouvement associatif Centre-Val de Loire, Virage Énergie, la Ligue de l’Enseignement, des bailleurs, des régies de quartier et de territoire, l’Adie ; sans oublier l’ADEME, l’ANCT et la Région Centre-Val de Loire. Cette large diversité des acteur·ices est un atout dont il faut prendre soin, et l’interconnaissance une force pour nourrir le réseau régional naissant.

L’UNION FAIT LA FORCE

En introduction de la journée, Élisabeth Richez, chargée de mission transitions à Villes au Carré, rappelle à quel point les enjeux environnementaux et sociaux sont étroitement liés et pourquoi ils doivent être traités de manière conjointe pour répondre à l’objectif de réduction des inégalités. On sait bien aujourd’hui que les populations les plus pauvres subissent le plus fortement les conséquences du dérèglement climatique alors même qu’elles sont les moins émettrices de gaz à effets de serre… C’est pour faire prendre conscience de ce lien et intégrer les enjeux environnementaux dans les contrats de villes que l’expérimentation a été lancée au moment où ces derniers étaient en cours d’évaluation. Et c’est pour accompagner les acteur·ices dans ces nouveaux contrats de ville 2024 à 2030 – au nombre de 19 en région Centre-Val de Loire – que le réseau régional voit le jour

Camille Dubrulle, ingénieure Démarches territoriales de transition pour l’ADEME Centre-Val de Loire, indique ensuite les raisons qui ont motivé l’ADEME à soutenir financièrement cette expérimentation. « Depuis 2022, l’ADEME porte une vision plus large et systémique de la transition écologique et choisit d’accompagner en profondeur les changements de comportement. Parce qu’il met ces quartiers et leurs transitions en lumière et leur porte un regard différent, ce projet formalise cet engagement dans la transition juste. Il amplifie aussi la mobilisation mise en œuvre par le projet européen Life Let’s Go 4 Climate animé par la Région Centre-Val de Loire et l’ADEME régionale. »

ÉLU·ES, PROFESSIONNEL·LES, HABITANT·ES : SE METTRE EN MOUVEMENT ENSEMBLE AUTOUR DES TRANSITIONS

Avant d’écouter les retours des 6 territoires engagés dans la démarche, Villes au Carré rappelle les objectifs initiaux de cette expérimentation : l’interconnaissance entre les acteurs de la politique de la ville et ceux de l’environnement nécessaire pour coopérer et co-construire des projets bénéficiant aux habitants, la construction d’une culture commune sur les transitions écologiques et sociales, la valorisation des actions déjà en place, la montée en compétences des acteur·ices de la politique de la ville.

Pendant 2 ans, des phases de diagnostics, d’ateliers, de formations aux outils d’animation et de restitutions ont ainsi rassemblé élu·es, agents des collectivités, État, associations, bailleurs et habitants. En mars 2023 puis juin 2024, deux journées régionales ont permis de favoriser à nouveau l’interconnaissance et de capitaliser les apports de l’expérimentation en travaillant sur la méthodologie pour intégrer les transitions au sein des quartiers. Résultat ? La mise en place d’un réseau découlant de toutes ces actions, ouvert à l’ensemble des 19 contrats de ville de la région ainsi qu’à toutes les associations et acteur·ices partenaires.

Sur les 6 territoires, 5 sont représentés ce 11 juin. Les témoignages et prises de parole de leurs représentants alimentent les échanges qui suivent. Marie Quinton, Adjointe déléguée au logement, à la politique de la ville et à la lutte contre l’exclusion à Tours revient sur les raisons de l’engagement de son territoire, notamment sur la prise de conscience qui a suivi la crise du Covid et les canicules : « Une fois qu’on a compris que les inégalités sociales et environnementales sont liées, on peut travailler à mieux les combattre ! Le multiculturalisme permet d’aller chercher des solutions sur la base des savoirs et idées des habitant·es tout en les rendant fier·es de leur quartier. » Pour Yann Laffont, Conseiller délégué aux énergies nouvelles et à la transition énergétique des bâtiments à Agglopolys, l’expérimentation rejoignait plusieurs objectifs de la ville de Blois où deux quartiers sont parmi les plus défavorisés à l’échelle régionale : permettre l’échange, développer les synergies, faire découvrir des outils d’animation et donner des points de repère sur les enjeux climatiques.

Pour Catherine Pallot, élue de Bourges Plus, son engagement dans ce programme a permis de booster les actions déjà existantes et d’en faire éclore de nouvelles. « Notre rôle, en tant qu’élu·es c’est de se déplacer et d’être à l’écoute, de s’inspirer et de nouer des contacts. Il faut aussi veiller à ce que les transitions soient un fil rouge, une ambition transversale ! Bref, donner de l’importance à toutes les petites actions qui forment cette grande rivière. » Elle observe que les projets n’avancent pas sans l’implication, l’élan et le soutien des élu·es.

Châteauroux Métropole partage son vécu via le prisme de la place des habitant·es et de son conseil citoyen. Les habitant·es se sentent utiles et écouté·es. Ils·elles sont considéré·es comme expert·es de leurs quartiers, et les professionnels et institutions intègrent leurs avis. « Je ne m’attendais pas à avoir autant d’impact ! », explique Fabien, l’un des membres du conseil. Jardins partagés, collecte de déchets, construction d’un nouveau centre socio-culturel, réhabilitation d’une friche industrielle : les projets se multiplient et les idées ne manquent pas. Ce qu’ils ont mis en évidence ? L’importance de passer par les structures qui les accompagnent au quotidien pour mobiliser les habitant·es, connaître les enjeux des un·es et des autres pour mieux se comprendre.

Les chargées de mission de la Communauté d’Agglomération du Pays de Dreux se sont exprimées sur l’importance de la coopération inter-services. Les rencontres initiées lors de l’expérimentation ont été  essentielles pour beaucoup de partenaires qui ne se connaissaient pas. L’expérimentation a permis l’émergence d’un espace d’échanges entre les différents services de l’agglomération et ceux des villes.

Cet espace sera animé par la chargée de mission contrat de ville et habitat et a été inscrit dans le nouveau contrat de ville. À la suite de l’expérimentation, le service environnement de l’agglomération s’est rapproché du centre social de Vernouillet pour co-construire des ateliers au profit des habitants. Les enseignements ? La nécessité d’avoir des lieux d’échanges pour se connaître et construire ensemble des projets croisant les enjeux des différents partenaires ; passer par des personnes en contact direct avec les habitants pour mieux les mobiliser.

“REBOND” par DOMINIQUE ROYOUX

À l’issue de ces échanges, le géographe, professeur émérite des Universités à Poitiers, Dominique Royoux, réagit et élargit le propos. Villes au Carré fait appel régulièrement à des chercheurs pour bénéficier de leurs analyses sur son travail et sur l’évolution de la société. Dominique Royoux, membre du Conseil scientifique de Villes au Carré s’intéresse particulièrement au lien entre précarité et écologie. Il partage son constat après les témoignages : « Chaque atelier a abordé les sujets des autres ateliers, preuve que toutes les thématiques sont transversales ». Il remet en évidence les 3 ingrédients nécessaires à la réussite des projets : la coopération entre acteur·ices, la mobilisation des habitant·es et l’implication des élu·es. Après un échange avec les participant·es, il conclut son intervention :  » La transition écologique doit devenir centrale et les différentes politiques publiques, environnementales ou sociales, doivent être interconnectées et réunir tous les acteur·ices » .

[PAUSE EN COHÉRENCE]

C’est l’heure de déjeuner. Les discussions et les rencontres se poursuivent autour d’un repas végétarien gourmand, élaboré par « Saveurs et talents », une entreprise d’insertion locale. 

ET MAINTENANT ?

Les apports de l’expérimentation, les échanges du jour et la conclusion de Dominique Royoux ont bien mis en évidence la nécessité de l’interconnaissance, de la mise en réseau inter-acteurs. L’après-midi, Villes au Carré déploie donc un nouvel outil, le forum ouvert, pour faire le lien entre cette conclusion et le réseau « Transitions & Quartiers » qu’elle a pour objectif d’animer. Ce temps a pour but de mettre en lumière les thèmes à travailler en priorité lors du cycle de qualification dédié au réseau « Transitions & Quartiers » . 

Premièrement, il s’agit pour les participant·es de produire un maximum de sujets sur lesquels ils·elles sentent le besoin de travailler et de les regrouper en quelques grandes thématiques. Ensuite, en plusieurs petits groupes, les participant·es approfondissent  les thématiques retenues : « coopérer », « s’organiser », « lutter pour réduire les vulnérabilités et les précarités », « professionnalisation des métiers de la transition écologique », « comment embarquer durablement ? ». Ainsi sont mis  en évidence les enjeux de chaque problématique, les difficultés rencontrées, les acteur·ices concerné·es, mais aussi le type d’accompagnement qui serait attendu du futur réseau. Par exemple, une cartographie des acteurs existants, l’organisation de temps d’échanges ou des visites de terrain…

Pour terminer, toutes les productions écrites sont partagées et chacun·e peut pointer ce qui lui semble prioritaire. Le forum et la journée se clôturent par l’intervention d’Élisabeth Richez et de Lucie Hervé, ingénieure territoriale à l’ADEME. Un dernier échange, tel un trait d’union pour imaginer la suite, sur ces bases définies collectivement.

📌 Prochain rendez-vous : À l’automne lors d’un atelier du réseau Quartiers & Transitions

Élisabeth Richez
Chargée de mission Transitions - elisabeth.richez@villesaucarre.org

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